Wednesday, August 19, 2015

Muriel Hermine « Le plaisir avant tout » FFN


Muriel Hermine a dominé la natation synchronisée européenne dans les années 1980 en remportant notamment quatre couronnes continentales. Agée de 50 ans, la sirène a décidé de replonger pour conquérir un titre aux championnats du monde des maîtres de Kazan, histoire de montrer que les années n’entament pas la motivation ou la concrétisation de projets personnels forts et précieux. Objectif atteint ! Muriel est même la seule athlète de la compétition à franchir la barre des 80 points (81,8875 unités).
Qu’est-ce qui vous a poussé à replonger ?
J’ai décidé de revenir à la compétition parce que c’était cohérent avec mon travail de coach en entreprise et de conférencière. En effet, j’interviens de plus en plus devant des managers, des cadres et des dirigeants démotivés et en profonde réflexion sur eux-mêmes et leur avenir. Je défends l’intime conviction qu’une nouvelle vie commence à partir de 45/50 ans, dans laquelle l’épanouissement de la personne et les capacités à relever de grands défis trouvent toujours leur place. C’est pour prouver que ce que je dis est vrai que j’ai repris la compétition.
Quel a été l’événement déclencheur ?
C’est cette hernie discale, contractée l’an dernier, qui m’a contrainte à replonger pour tenter d’éviter l’opération et apaiser la douleur.
Quelle était, au départ, l’ambition ?
C’est plus une ambition sociétale que sportive, en fait. L’idée n’était pas de montrer que l’on peut « rester », mais plutôt que l’on peut gravir sans cesse et sans limite d’âge, les montagnes de nos rêves.
De quelle manière s’est déroulée votre préparation ?
J’ai repris tout doucement, en catimini, pour voir si j’en étais capable et comment réagissait mon corps. Et lorsque j’ai senti que les sensations revenaient, que la technique n’était pas loin, que mon corps répondait au-delà de mes espérances, j’ai commencé à me dire que c’était possible. J’ai donc cherché à m’entourer d’une équipe qui croirait en moi et qui pourrait m’aider à relever ce grand défi.
Comment avez-vous organisé votre vie pour relever pareil challenge ?
J’ai regardé comment adapter ma vie, mon travail, ma famille, aux contraintes inhérentes à ce projet ambitieux. Quelles étaient les choses auxquelles j’étais prête à renoncer au moins temporairement pour trouver un nombre d’heures suffisantes pour m’entraîner à la hauteur de mon ambition.

Qui s’est occupé du maillot et qui a fait le choix de la musique et de la chorégraphie ?
J’ai fait le choix du Stabat Mater de Vivaldi car dès que j’ai entendu cette musique, j’ai ressenti une émotion très forte. Le thème, la voix de Philippe Jaroussky, l’intention de l’auteur… c’était vraiment la musique idéale pour porter et sublimer mon message d’espoir. Ensuite, j’ai monté la chorégraphie avec Françoise Noyer-Schuler, mon entraîneur fétiche. Enfin, j’ai cherché une créatrice de maillots de synchro qui mettrait son talent au service du message. C’est Marie-Laurence Tiberghein du Stade Français qui l’a réalisé.
Comment décrirais-tu l’ambiance entre les quatre Françaises engagées dans les épreuves de natation synchronisée des championnats du monde de Kazan ?
Je n’ai jamais connu une ambiance aussi chaleureuse au sein d’une équipe d’athlètes ! Avec l’âge, arrive la maturité et la compréhension que notre vie ne dépend pas de l’obtention d’une médaille. Cela permet d’aborder la compétition en y recherchant avant tout le plaisir. Jeune, l’envie de gagner était telle que j’éprouvais peu ou pas de plaisir. Même l’obtention d’un titre européen ne me remplissait pas de joie. Je n’étais jamais satisfaite !
Qu’as-tu pensé de l’organisation des championnats du monde des maîtres ?
L’organisation a été exceptionnelle ! Nous avons profité des infrastructures mises en place pour la compétition des « jeunes » et de ce fait avons été accueillis, encadrés et respectés comme de vrais athlètes.
Tu réalises ton jubilé en septembre. Cela signifie-t-il que tu raccroches définitivement le maillot et qu’on ne te reverra plus en maîtres ?
Très probablement ! Je voulais incarner un message, une conviction. J’ai atteint mon but et montré qu’à 50 ans, tout reste possible ! Pour moi continuer n’a aucun sens. Je préfère mettre mon énergie ailleurs, même si je pense que j’ai encore une marge de progression.
Recueilli par Éric Huynh

FÉDÉRATION FRANÇAISE DE NATATION




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